Bienvenue à la journée d'étude

L’UMR Territoires accueillera le 26 mai 2025, dans les locaux de l’Institut d'Auvergne-Rhône-Alpes du Développement des Territoires (IADT) de Clermont-Ferrand, une journée d’études : Organisation et accès aux soins hospitaliers dans les territoires ruraux. Cette journée d’études interrogera principalement les récentes réorganisations du système hospitalier et leurs conséquences sur l’accès aux soins hospitaliers pour les habitants des territoires ruraux.

L’évènement est ouvert au personnel de la recherche (doctorants, post-doctorants, personnels d’appui, chercheurs, enseignants-chercheurs) de toutes disciplines, aux différents acteurs de la santé (professionnels de santé, syndicats, ARS, organismes publics…) et aux représentants des usagers/associations de patients s’intéressant aux parcours de soins hospitaliers dans les territoires ruraux.

 

Comité d'organisation : 

Sophie Baudet-Michel (UMR Géographie-cités, Université Paris Cité), Benoit Conti (Université Gustave Eiffel, LVMT), Yohan Fayet (Université Clermont Auvergne – UMR Territoires), Mauricio Fuentes-Vallejo (Département SHS – Centre Léon Bérard), Véronique Lucas-Gabrielli (IRDES), Émilie Mirault-Colin (Université Clermont Auvergne – IADT), Corinne Rochette (Université Clermont Auvergne, CleRMa)

   

Journée d'étude organisée avec le soutien de :

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Contexte et présentation de la journée d’étude

Lieu de concentration des expertises médicales, garantissant l’accessibilité des techniques médicales et soins spécialisés ou complexes (Coldefy et Lefebvre, 2019), maillon essentiel du système de santé français, l’hôpital a été concerné, depuis les années 1970, par des nombreuses lois et réformes visant à réorganiser et rationaliser l’offre de soins suivant une logique de gradation des soins. Ce principe vise à adapter « l’échelle de la planification des soins en fonction du niveau de spécialisation de l’activité ou du coût des équipements » (Fayet et al., 2022). La rationalisation de l’offre de soins hospitaliers traduit, selon E. Vigneron, « une volonté de régulation des dépenses dans un contexte économique difficile autant qu’un souci de recherche de la qualité » (Vigneron et Cartier, 2011). Elle vise, notamment par l’instauration des Groupements Hospitaliers de Territoire (GHT), à réorganiser et restructurer l’offre entre les différents établissements hospitaliers d’un même territoire.

Cette trajectoire de rationalisation de l’offre de soins hospitaliers en France a des conséquences spatialement différenciées et semble toucher particulièrement les territoires ruraux (entendus ici comme comprenant les espaces de faible densité et les petites villes avec lesquelles ces espaces sont en relation directe). En effet, les équipements hospitaliers de ces petites villes sont les premiers concernés par la réduction ou la redéfinition de leurs missions, par la perte ou le repositionnement de certains services, voire par leur fermeture complète dans certains cas.

En 2018, sous l’effet de la rétraction de l’offre de soins hospitaliers dans les villes petites et moyennes, notamment en ce qui concerne les lits de court séjour, moins de la moitié des aires urbaines (480/778) sont équipées d’un hôpital (Conti, Baudet-Michel, Neindre, 2020). Dans le cas des territoires ruraux, ces réorganisations de l’offre de soins à l’échelle locale ne pouvant être compensées par la présence d’un autre équipement hospitalier (public ou privé) à proximité, elles entrainent un accroissement net des distances à parcourir pour les patients. En 2018, 40 % de la population des espaces ruraux se trouvaient à plus de 30 minutes d’un hôpital doté d’un service de chirurgie contre 8 minutes pour les habitants des pôles urbains (Conti et al., 2021).

Parallèlement, le recours accru aux innovations technologiques et l’évolution des pratiques spatiales de recours aux soins des patients (certains étant plus enclins à parcourir de longues distances afin d’accéder à des soins perçus comme étant de meilleure qualité) ont accéléré le recours aux centres spécialisés. Ces nouvelles pratiques de mobilité, conjuguées à la rétraction de l’offre de soins hospitaliers, entrainent la concentration spatiale de l’activité de soins hospitaliers au sein des principales aires urbaines françaises, notamment en ce qui concerne les soins les plus spécialisés ou complexes (Mériade et Rochette, 2021 ; Besle et al., 2021). Dans le domaine du cancer, par exemple, l’activité de chirurgie des cancers a augmenté de plus de 9 % entre 2005 et 2012 dans les principales aires urbaines françaises alors qu’elle a très légèrement diminué dans les autres communes (-0,3 %) (Fayet et al., 2022). Cette concentration spatiale de l’activité de soins hospitaliers sous-entend également un accroissement des distances à parcourir pour les patients afin d’accéder à des soins hospitaliers, et notamment pour ceux habitant des territoires ruraux. Il pourrait être intéressant de mieux documenter cet accroissement des distances à parcourir et d’en étudier les effets, d’autant plus que la population des territoires ruraux est relativement plus âgée, comparativement à la moyenne nationale (Paumelle, 2024). En effet, le vieillissement implique des besoins de soins plus élevés et spécifiques, et donc une plus grande fréquence de trajets en direction des centres hospitaliers, alors même que les populations rurales et âgées sont généralement moins favorables et/ou plus impactées par les longs trajets (Chasles, Fayet et Juvanon, 2018).

Cette longue dynamique de concentration spatiale de l’activité de soins hospitaliers, et donc d’éloignement pour les patients des territoires ruraux, semble pourtant aujourd’hui pouvoir être théoriquement modifiée par plusieurs évolutions récentes. D’une part, la labélisation « d’hôpitaux de proximité » à partir de 2021, statut particulier permettant de redéfinir les missions et les modalités de financement de ces petits établissements en tant que « trait d’union » entre le monde hospitalier et les acteurs de santé du territoire, vise à renforcer certaines missions de proximité de ces hôpitaux et décentraliser davantage certains actes ou soins. De plus, la crise du système hospitalier public s’est intensifiée à la suite de la pandémie de COVID-19 (Juven, Pierru, Vincent, 2019 ; Gaudillière, Izambert, Juven, 2021), renforçant les difficultés de recrutement de personnel de santé, fragilisant de nombreux établissements et menaçant leur capacité à garantir la permanence et la qualité des soins. Certains services d’urgence ont été contraints de fermer temporairement durant les étés 2023 et 2024, ou de fermer des lits dans certains services en attendant d’être capable de les réouvrir lorsque les recrutements de personnel médical et/ou paramédical le permettront. Parallèlement, les initiatives d’universitarisation des centres hospitaliers généraux permettent de décentraliser la formation des étudiants en médecine et de renforcer l’offre de soins dans les territoires ruraux. Enfin, le coût économique et écologique du transport médical (Dalmas et al., 2022) pourrait prochainement conduire à des mesures visant à encadrer plus strictement les mobilités hospitalières et encourager le recours aux établissements de proximité, même si tout principe de limitation ou d’encadrement des mobilités ne figure pas officiellement au programme de la planification écologique du système de santé. Ces récentes évolutions semblent particulièrement susceptibles de modifier l’organisation et l’accès aux soins hospitaliers dans les territoires ruraux et de renforcer la spécificité des parcours de soins des patients habitant ces territoires. Elles appellent à un renouvellement des questionnements et à un renforcement des interactions entre chercheurs et acteurs du système de santé afin de mieux appréhender les conséquences spatiales de ces évolutions du système hospitalier.

 

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